Saint Paul donne une épître à saint Timothée |
C'est plus que jamais le moment d'étudier la doctrine catholique, afin de ne pas être ballottés au gré des vents dominants et
d'avoir les points de repère pour se diriger dans la crise actuelle. C'est cette doctrine qui m'inspire ici. Plus je l'approfondis, plus je la trouve lumineuse et équilibrée. C'est aussi le moment de connaître l'histoire de l'Eglise, qui est passée par bien des crises.
Alors regardons cela de plus près. La doctrine nous dit qu'il y a l'Eglise enseignante et l'Eglise enseignée. La première est constituée du pape et des évêques en communion avec lui. La seconde est constituée par toute l'Eglise, car pape et évêques doivent eux-mêmes se mettre à l'écoute de ce qu'a dit le magistère antérieur. Citons ici ce que disait la constitution dogmatique Pastor aeternus, du concile Vatican I (15 juillet 1870), au chapitre IV: Car le Saint Esprit n'a pas été promis aux successeurs de Pierre pour qu'ils fassent connaître, sous sa révélation, une nouvelle doctrine, mais pour qu'avec son assistance ils gardent saintement et exposent fidèlement la révélation transmise par les Apôtres, c'est-à-dire le dépôt de la foi
Un autre point de doctrine: ni un évêque en particulier, ni un groupe d'évêques, une conférence épiscopale par exemple, ne jouissent du charisme de l'infaillibilité. En soi, un évêque peut même tomber dans l'hérésie et ne plus avoir la foi. L'histoire nous en donne de tristes exemples. A fortiori, sans être formellement hérétique, il peut dire des choses décevantes, ambiguës, ou qui poussent à l'hérésie. L'histoire de la crise arienne est éclairante à cet égard. Et elle a duré longtemps. Newman a été frappé de ce fait. En cette triste époque de l'histoire, c'est l'Eglise enseignée qui resta fidèle à la foi, alors qu'une grande partie de la hiérarchie fut lamentable. On pourrait aussi ici citer un exemple plus récent, d'une époque plus proche de la nôtre et qui ne fut pas toujours brillante, même si elle connut en même temps de grands saints, le XVIIIe siècle. En 1781, à la mort de l'archevêque de Paris, Christophe de Beaumont, le parti mondain poussa la candidature du tristement célèbre Loménie de Brienne. Louis XVI, fervent catholique mais mal entouré, eut cependant le courage de mettre son veto et s'écria: "Pour Paris, je voudrais au moins un évêque qui eût le foi!".
Mais pourquoi donc le Bon Dieu permet-il tout cela? La doctrine est simple et consolante: Dieu permet le mal pour en retirer ensuite un bien plus grand. Un exemple historique? En voici un. En novembre 1331, le pape Jean XXII, lors d'un sermon, jeta le trouble dans l'Eglise tout entière. Il affirma en effet que les âmes des justes ne jouiraient de la vision béatifique, que seulement à la fin des temps, après la résurrection des corps. Il se démarquait ainsi de la doctrine commune de l'Eglise, doctrine universelle, possession paisible de la foi catholique, mais qui n'avait pas encore été sanctionnée par un acte infaillible du magistère. Heureusement il se rétracta, gravement malade, en 1334. Mais il fallait clarifier les choses. Cela fut fait par son successeur, Benoît XII. La bulle Benedictus Dominus, du 30 janvier 1336, est un des exemples traditionnels de document pontifical ex cathedra, jouissant donc d'une infaillibilité absolue. Le pape définit comme dogme définitif et intangible que le châtiment éternel commence tout de suite après le jugement particulier. De même la récompense éternelle, la vision béatifique, commence après ce même jugement, sauf qu'elle peut être retardée par le processus de purification des fautes, le purgatoire. Une confusion temporaire dans l'Eglise s'est donc terminée par un triomphe éclatant de la vérité catholique.
J'aime ici parler du fameux songe de don Bosco, appelé le songe des deux colonnes. En voici succinctement le récit : Don Bosco eut la vision de l'Eglise sous la forme d'un navire dans la tempête, attaquée de toutes parts. Le pape, commandant le bateau, fut même tué. Mais un nouveau pape fut élu et il arrima le navire à deux colonnes, l'une, plus grande, symbolisait l'eucharistie, l'autre, plus petite, la Vierge Marie. Aussitôt la tempête cessa et les ennemis furent en déroute. Songe d'une étrange actualité! Au cœur de la crise actuelle, il y a la perte du sens de la messe et la perte de la dévotion mariale. Mais Jésus tôt ou tard apaisera la tempête et nous verrons une Eglise rajeunie.
Que dire encore pour ne pas se laisser intimider par tout ce qui se passe actuellement? D'abord, une chose qui a été bien mise en lumière par l'abbé Lucien, dans les Degrés d'autorité du magistère. Lorsque à un moment donné de l'histoire de l'Eglise, les évêques avec le pape, avec une unanimité morale, ont enseigné un point de doctrine sur la foi ou les mœurs, comme devant être tenu par tous, cet enseignement est revêtu de l'infaillibilité et est donc définitif. Cette infaillibilité concerne les déclarations ex cathedra des papes ainsi que les définitions et anathèmes solennels des conciles, mais aussi le magistère universel ordinaire de l'Eglise. Nous pouvons en conclure qu'il ne suffit pas de s'intéresser à ce qui se dit dans l'Eglise contemporaine. Il faut aussi explorer toute la richesse de la Tradition magistérielle de l'Eglise. Toute une série d'éléments gardent toute leur valeur. Ainsi les anathèmes du concile de Trente, qui nous donnent encore tant de repères doctrinaux. Dans les débats sur le mariage et la famille, qui nous agitent aujourd'hui et sur lesquels il y a une telle confusion, j'aimerais rappeler que l'encyclique Casti connubii, du pape Pie XI, du 30 décembre 1931, fut à l'époque reçue avec unanimité par les évêques du monde entier et répercutée comme telle. Elle est reprise trois fois par le concile Vatican II, elle inspire Humanae Vitae et est citée par le Catéchisme de l'Eglise catholique. On peut donc considérer qu'elle exprime infailliblement la pensée de l'Eglise, et tous nos modernes théologiens qui s'épuisent à mettre au goût du jour la morale chrétienne ne sont que des charlatans et des imposteurs.
Un autre domaine à explorer: la sainteté dans l'Eglise. Que de choses à découvrir et qui nous éclairent! Nous avons ici à apprendre quelque chose de nos frères orthodoxes et qu'ils appellent le magistère des saints. Je me souviens d'une réflexion entendue lors d'un voyage en Roumanie, alors qu'on parlait de la persécution athée et des compromissions de la haute hiérarchie. Quelqu'un fit remarquer: "oui, tout cela est vrai, mais qu'importe pour nous, il y a eu la fidélité héroïque des saints moines, ces pères spirituels orthodoxes" Que vaut en effet la parole pâle ou ambiguë de tel évêque ou de tel théologien, face à ce qu'ont dit ou écrit le padre Pio, Maximilien Kolbe, Mère Theresa ou Marthe Robin? Certains saints tout particulièrement ont été reconnus comme exprimant bien la doctrine de l'Eglise. On a même dit qu'un saint François de Sales jouissait d'une certaine infaillibilité sur toutes les questions de vie spirituelle. Un pape comme Pie IX n'était pas loin de le penser.
Alors comment réagir? Première chose: ne pas critiquer la hiérarchie. C'est du moins ce que je pense. Car elle reste une réalité sainte, et malgré tout c'est d'elle que découle la grâce sur toute l'Eglise. En Russie, au temps du communisme athée et des compromissions de la hiérarchie, on aimait dire qu'un mauvais évêque pouvait ordonner des centaines de bons prêtres! Parfois on peut être surpris. Un évêque peut, alors qu'il a dans une interview été ambigu ou mondain, prononcer ensuite dans sa cathédrale une homélie impeccable. Plutôt que de se répandre en critiques, il vaut mieux prier et souffrir en silence. Le bien ne fait pas de bruit et le bruit ne fait pas de bien. Un simple fidèle qui prie son rosaire peut faire beaucoup pour une solution rapide et heureuse de la crise actuelle.
Ensuite tenons fermes dans notre foi et étudions la doctrine authentique de l'Eglise ainsi que les écrits des saints. Pour conclure citons ce que saint Paul disait à Timothée: Quant à toi, tiens-toi à ce que tu as appris et qui t'a été confié. Tu sais de qui tu l'as appris et que depuis la tendre enfance tu connais les saintes lettres qui peuvent te rendre sage en vue du salut par la foi dans le Christ Jésus. (II Tim 3, 14-15)
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