Le Père Zanotti-Sorkine à Marseille |
Le décret de dissolution de la Fraternité des saints apôtres vient donc d'être officiellement promulgué par l'archevêché de Malines-Bruxelles. Lors de ses adieux, Mgr Léonard avait dit que l'un des cadeaux qu'il laissait en quittant sa charge était l'existence d'un certain nombre de séminariste, gage de futures ordinations de prêtres dans l'archidiocèse, et espoir d'une relève. Il léguait cela à son successeur avec une joie non dissimulée. Pour certains d'entre eux l'expérience va s'arrêter.
Que faut-il en penser? Certains ne cachent pas leur tristesse et leur déception, ni leur crainte pour l'avenir immédiat de l'Eglise en Belgique. Leur douleur doit être entendue. Car celle-ci montre qu'ils ne sont pas insensibles à ce problème grave qu'est la vocation sacerdotale et la formation des séminaristes.
Le primat de Belgique dit avoir pris sa décision devant Dieu et en conscience. Il a aussi consulté les autres évêques du royaume ainsi que les instances romaines compétentes. Comme toute décision de la hiérarchie, celle-ci doit être reçue avec un a priori favorable. En effet personnellement je ne vois pas comment on pourrait mettre en doute sa parole. Tout au plus pourrait-on, en cas de désaccord profond, pratiquer ce qu'on appelait au XVIIe siècle, lors du conflit janséniste, le "silence respectueux".
Mais vous m'objecterez saint Thomas d'Aquin et ce qu'il dit sur l'obligation de pratiquer la correction fraternelle à l'égard des prélats qui nuisent au bien commun de l'Eglise. Oui mais dans ce cas, il vous faudrait une certitude morale suffisante, basée sur une entière connaissance du dossier. Tant que vous ne l'avez pas, vos critiques sont stériles et vous vous exposez peut-être à devoir plus tard vous déjuger.
Je prends cependant l'objecteur au sérieux et j'admets comme supposition que l'archevêque a commis une faute ou du moins une erreur. Dans ce cas, l'obéissance demeure la voie chrétienne traditionnelle. Obéir promptement, surtout avec son intelligence, est le seul moyen pour que la volonté de Dieu se réalise, par les voies qui sont les siennes. L'exemple de tant de saints nous le prouve à travers l'histoire de l'Eglise. Si on croit vraiment en la Divine providence, on a cette assurance qu'il faut s'abandonner avec confiance, malgré toutes les apparences contraires, car Dieu permet le mal, pour qu'en sorte un bien plus grand.
Dom Lambert Beauduin, le fondateur du monastère bénédictin de Chevetogne, avait une vision sur le renouveau monastique et sur l'unité des chrétiens, qui dérangeait un certain de nombre d'autorités de l'époque. Il avait eu l'appui du cardinal Mercier, mais celui-ci n'était plus. Dom Lambert fut finalement frappé d'une sanction administrative, car on n'avait rien trouvé contre lui du point de vue doctrinal ou du point de vue moral. Il dut s'exiler en France. Il se soumit et jamais ne se révolta. Sa patience et sa persévérance à la longue furent payantes. Sur sa tombe on peut lire cet éloge: Vir Dei et ecclesiae, Homme de Dieu et de l'Eglise. Il aimait dire en effet qu'on ne critique pas sa mère.
J'espère que le Père Zanotti-Sorkine saura trouver les mots justes pour guider ses enfants spirituels sur la bonne voie. Je prie beaucoup pour eux tous.
La crise de l'Eglise, crise de la foi, de la liturgie et du sacerdoce
Quelle que soit la vérité ultime sur les péripéties actuelles de cette fraternité ou d'autres, comme celles qui concernent la présence à Rennes de l'Institut du Christ Roi Souverain Prêtre, il nous faut aborder la question de la crise actuelle de l'Eglise et élever le débat.
Il s'agit d'abord de la pureté de la doctrine de la foi. De quoi s'agit-il? Ni plus ni moins que de l'affrontement apocalyptique entre la foi prêchée par Jésus-Christ et les apôtres et une nouvelle religion, profondément antichristique. Relisons ce que saint Jean nous disait dans sa première épître: Enfants, c'est la dernière heure. Vous avez entendu que l'Antéchrist vient. De même à présent il y a beaucoup d'Antéchrists, et par là nous savons que c'est la dernière heure. Ils sont sortis de chez nous, mais ils n'étaient pas des nôtres, car s'ils avaient été des nôtres, ils seraient restés avec nous; mais c'était pour montrer que tous ne sont pas des nôtres (1 Jn, 2, 18-19). Oui, les hérétiques et les apostats sont parmi nous. Comme le disait le bienheureux Paul VI, les fumées de Satan sont entrées dans le sanctuaire. Le saint Pape Pie X notait déjà que les hérétiques modernistes, au lieu de quitter l'Eglise comme leurs devanciers, restait en son sein pour la détruire de l'intérieur. Alors que les hérésies anciennes consistaient à nier l'une ou l'autre vérité de la foi, de nos jours il s'agit de tout autre chose: une nouvelle religion, centrée sur l'homme et le monde actuel, sans aucune visée transcendante. Le christianisme est rabaissé à ce qu'on appelle des valeurs (on ne parle plus de commandements à observer pour mériter le ciel!), valeurs seulement susceptibles de rendre notre vie sur terre plus agréable. Certes vivre l’Évangile nous donne déjà le bonheur véritable sur terre, mais surtout il nous apprend comment obtenir le bonheur éternel. Alors méfions-nous, si un évêque, un prêtre, un théologien nous parle beaucoup des droits de l'homme, des problèmes sociaux ou politiques, s'il en reste toujours à des points de vue psychologiques ou sociologiques, et ne parle jamais du ciel ou de l'enfer, du salut par la Croix du Christ, du péché et du jugement; il se pourrait bien que nous ayons à faire à l'un de ceux qui ne sont pas des nôtres, selon la formule nette de saint Jean. Il y a une chose à ajouter. Un bon critère de discernement dans la confusion actuelle est le critère marial. Vous pouvez faire confiance à quelqu'un si vous savez qu'il dit son chapelet, car un fidèle de la Vierge pourra momentanément déraper, Marie le remettra tôt ou tard sur la bonne voie.
Car ce combat apocalyptique est celui qui oppose la Mère de Dieu, la Vierge Immaculée, et l'antique serpent, le séducteur, le diable. Il faut relire là-dessus le chapitre 12 de l'Apocalypse: Le dragon s'irrita contre la femme et s'en alla faire la guerre au reste de sa descendance (Ap 12, 17). La femme, c'est Marie, c'est l'Eglise, mais c'est aussi la femme tout simplement. Car actuellement c'est surtout au niveau de la morale simplement naturelle que se joue ce combat eschatologique. Divorce, avortement, contraception, homosexualité, voilà des domaines sur lesquels se vérifient ou non la pureté doctrinale des maîtres d'aujourd'hui. Lucie de Fatima l'a rappelé dans une lettre au cardinal Caffara: La bataille finale entre le Seigneur et le règne de Satan portera sur la famille et le mariage.
La crise de l'Eglise est aussi une crise liturgique. La solidité et l'unité de la foi dépendent en très grande partie de la solidité et de l'unité de la liturgie. Dans ce domaine, le diable s'est déchaîné et les ravages sont immenses. Toute une génération a désappris à célébrer. On pourrait élever des rayons entiers pour y classer tous les documents du saint-Siège sur la liturgie qui sont restés lettre morte. Anne-Catherine Emmerich avait annoncé que dans les années soixante du XXe siècle, le diable serait lâché pour un temps et qu'il s'agiterait beaucoup. Tiens c'est en 1964, si je ne m'abuse, qu'on a cessé de dire après la messe la prière d'exorcisme à Saint Michel archange, prière que plus tard, saint Jean-Paul II nous a invités à reprendre. En tout cas, c'est peu après qu'on a vu apparaître les premières aberrations liturgiques. Je sais que la situation s'est plutôt améliorée. Une nouvelle génération de prêtres est apparue, qui suit mieux les directives de l'Eglise et qui célèbrent très pieusement. Mais il y a encore un long chemin à parcourir.
Enfin, et nous en revenons à nos propos du début, ce contre quoi le diable s'agite tout particulièrement, c'est contre le sacerdoce catholique. Des prêtres fervents et célibataires, totalement dévoués à leur ministère, cela il n'en veut plus. C'est pourquoi entre autres il remue périodiquement la question du célibat sacerdotal. On est parfois là-dessus en plein délire et dans une totale illusion. L'Eglise orthodoxe a la tradition d'un clergé marié. Je suis bien placé par mes contacts œcuméniques pour savoir que les choses ne s'y passent pas toujours si bien que çà. Si l'Eglise romaine atténuait la loi du célibat sacerdotal elle perdrait plus qu'elle n'y gagnerait. On connaît l'aphorisme suivant: Les prêtres saints font le peuple pieux, les prêtres pieux font le peuple honnête, les prêtres honnêtes font le peuple impie. Le mariage est sans nul doute une voie vers la sainteté. Je n'en doute absolument pas, il y a des laïcs mariés beaucoup plus saints que maint prêtres. Mais ne mélangeons pas les vocations. Un grand saint russe orthodoxe moderne, et qui était un prêtre marié, saint Jean de Cronstadt (1829-1908) était un apôtre de la communion fréquente et célébrait lui-même la divine liturgie tous les jours. Il avait pris conscience, face au mystère redoutable qu'est l'eucharistie, que le Seigneur l'appelait à vivre dans la continence parfaite. Voilà un magnifique témoignage en faveur du célibat sacerdotal, venu justement de nos frères d'orient.
Le diable a en horreur la messe et le prêtre. Il fera tout détruire l'un et l'autre, mais tenons bon, car à Fatima, Marie nous l'a promis: A la fin mon Cœur Immaculé triomphera.
Article connexe: Problèmes de conscience avec la hiérarchie
texte remarquable qui me donne une grande paix .Texte profond. Notre Dame de Fatima y est sûrement pour quelque chose. Généralement je ne lis pas certains sites où, par ex. on donne des détails précis sur la fin des temps ( stockage d'eau etc...)
RépondreSupprimerMais depuis le début de " l' affaire de la Fraternité ", j'aimais beaucoup penser aux petits bergers dont l'un se privait de chocolat pour la conversion des athées. Entourés de sceptiques, de persécuteurs même, la Vierge a fait pour eux et pour nous tous un grand miracle dont les fruits mûrissent encore
Oui devant les prophéties et révélations privées, il faut être prudent et discerner. Il faut se méfier de tout ce qui est spectaculaire ou ce qui s'apparente au cinéma catastrophe. Dans le cas de Fatima, l'épreuve du temps a confirmé l'authenticité et la solidité de la prophétie. Enfin n'oublions jamais que les vrais mystiques (Thérèse d'Avila, Padre Pio, Marthe Robin...) ont toujours eu les pieds sur terre.
RépondreSupprimerBonjour mon père. Je puis attester que toutes les réserves que vous mentionnez sont avérées. Si on accepte l'a priori favorable, les faits démontrent au minimum une incroyable légèreté. Sans cet a priori, on serait tenté d'y voir des mensonges avérés et des ruses bien peu évangéliques (la dissolution a été démentie à plusieurs reprises, avant d'être discrètement promulgée. Des engagements pris oralement devant des fidèles ne sont pas formalisés et encore moins respectés, l'épiscocat a refusé de manière conséquente de rencontrer les intéressés en personne, il est revenu à plusieurs reprises sur sa parole, etc...). Quant à la connaissance d'élements du dossier tenus secrets, ces éléments s'ils existent ne sont communiqués à personne, ou en tous cas pas aux intéressés. L'archevêque a rencontré des fidèles proches de la fraternité et les a assurés qu'il n'y avait pas de motifs scandaleux ne pouvant être révélés, et que les motifs réels ne différaient pas de ceux revendiqués dans le communiqué et le décret canonique. Enfin, si les membres de la fraternité sont tenus (et se tiennent) à l'obéissance, les fidèles ne font pas partie de la hiérarchie écclésiale.
RépondreSupprimerMerci de votre contribution, et surtout de votre prière ! !
Merci père Simon pour votre réflexion. Les prêtres de la FSA venaient de fait, avec un naturel déconcertant, restaurer le sens de la foi, de la liturgie et du sacerdoce, au coeur de Bruxelles. Ce fut un immense bonheur pour beaucoup. Mais cela est de fait insupportable aux yeux de ceux qui les combattent et les ont condamnés à mort. Car oui, la Fraternité des saints Apôtres est morte. Tuée par son archevêque. Avec la complicité de tous les évêques belges. Sans aucun motif grave, comme vous l'aurez remarqué (nous en aurions sinon été tous copieusement informés). Sinon qu'ils ont commis le crime de ramener dans le bercail de l'Eglise ceux qui s'en étaient éloignés, ou d'amener d'autres qui n'y étaient jamais entrés, de remplir de jeunes et de familles et de "sans familles", une église vouée à la désacralisation par Mgr Kockerols et ses prédecesseurs..
RépondreSupprimerNe vous inquiétez pas, ils obéissent à ce verdict meurtrier. La vingtaine de séminaristes errent ici et là, sans savoir quel rivage se poser. Les prêtres qui se sentent mal aimés (c'est peu dire) par leurs pasteurs, sont désormais privés de cette matrice qui a accueilli, porté et fait fructifier leur vocation. Le décret de dissolution ne dit plus qu'ils resteront à Sainte-Catherine, contrairement au communiqué précédent.
Le premier pan de la rumeur de fin avril (dissolution de la FSA) est confirmé. le second pan (fermeture de l'église Ste Catherine) suivra très vite, Tout est écrit. mais ce ne sera pas le dernier mot de l'histoire.
Les fidèles quant à eux, ont introduit un recours canonique car cette décision épiscopale n'est pas légitime. Vous parlez d'obéissance? Les évêques ne sont pas au-dessus des lois de l'Eglise. ..Il n'est écrit nullepart qu'il faut obéir à des injonctions qui vont contre les lois de l'Eglise, et les statuts des communautés.
Il serait grand temps que les pasteurs et le peuple de Dieu redécouvrent le vrai sens de l'obéissance et dénoncent toutes les formes d'abus de pouvoir car jamais, l'Esprit-Saint ne les inspire, même si on se rassure en disant que Dieu tire un bien de tout mal.
Oui, "à la fin, son Coeur Immaculé triomphera", mais d'ici là, il serait beau de voir des prêtres manifester leur solidarité avec les prêtres brisés de la FSA, puisque leur évêque a préfére la solidarité avec ses confrères évêques (certains) plutôt qu'avec ses fils plus fragiles...
Amis prêtres, nous attendons de vous des paroles et des actes concrets de solidarité, de réconfort et d'encouragement ,en direct, à vos confrères injustement persécutés (et non par voie de presse ou de blog svp). Merci pour eux.
Cher père Simon Noël, Je souscris à votre analyse. Une obéissance ABSOLUE ne doit s'exercer sur le seul contenu de la foi (la doctrine universelle du salut).
RépondreSupprimerPour ce qui est des actes pastoraux pratiques, c'est une obéissance différente qui est demandée : celle d'une attitude constructive, pour le bien de l'Eglise.
Pour illustrer cela, rien ne vaut un exemple : Voici une anecdote liée à la vie de saint Pierre Canisius (1521-1597, Jésuite), qui fut légat du pape lors de la contre-réforme qui ramena au catholicisme une grande partie des terres allemandes et Suisses conquises par la Réforme protestante.
le Père Canisius reçut vers 1570 une bulle pontificale qui décrétait l'excommunication latae sententiae pour toute personne détenant un des livres des théologiens réformés (tous mis à l'Index). Or Pierre Canisius passait ses soirées à étudier ces livres avec les élèves Protestants des nombreux collèges Jésuites qu'il gérait. A travers des débats (disputatio), il leur indiquait la réponse de la foi catholique. La bulle était donc absurde, suicidaire pour son apostolat si efficace.
Alors saint Pierre Canisius fit ce qu'il devait faire : il mit tout simplement la bulle dans sa poche et on n'apprit son existence que plusieurs années plus tard, bien après la mort du pape qui l'avait produite. Il faut remarquer que ce geste vint d'un Jésuite et que les Jésuites font un quatrième voeu de religion : celui d'obéissance absolue au pape. Je pense que ce saints avait compris ce que signifie une vraie obéissance absolue...
Bref, dans notre affaire, il est clair qu'une saine obéissance doit user des moyens du Droit mais aussi des protestations du "sensus fidei" des fidèles (dont la pétition ci-dessous postée par des fidèles de l'église sainte Brigitte), qui devra remonter jusqu'à Rome.
https://www.change.org/p/mgr-j-de-kesel-maintenez-la-fraternit%C3%A9-des-saints-ap%C3%B4tres-au-sein-de-l-eglise-de-belgique
Ce sera peut-être inefficace en apparence. Mais ce sera très efficace au fond des choses puisque l'Esprit Saint, qui préside à tout, pourrait écouter ces prières et retirer du pouvoir plus tôt qu'on ne l'espérait la génération de mai 68 qui préside à ce genre de décisions pastorales.