La
messe sans la communion ?
L’Église
désire qu'on communie à la messe
Le 20 décembre 1905 (oui ce n'est pas très récent!), sous le pape
saint Pie X, fut promulgué un décret du Saint-Siège, appelé
décret Sacra Tridentina, qui
commence par ces mots : Le saint concile de Trente,
ayant en vue les ineffables trésors de grâces que les fidèles
retirent de la réception de la très sainte Eucharistie, dit : Le
très saint Concile souhaiterait qu'à chaque messe les fidèles qui
y assistent ne se contentent pas de communier spirituellement, mais
reçoivent encore réellement le sacrement eucharistique (session
XXII, chap. VI). Ces paroles montrent assez clairement combien
l’Église désire que tous les fidèles s'approchent
chaque jour de ce banquet céleste et en retirent des effets plus
abondants de sanctification.
Plus loin dans ce même décret on peut lire ceci : La
communion fréquente et quotidienne, étant souverainement désirée
par Notre-Seigneur Jésus-Christ et par l’Église catholique, doit
être rendue accessible à tous les fidèles
chrétiens de quelque classe et de quelque condition qu'ils soient, en sorte que nul, s'il est en état de grâce et s'il s'approche de la sainte Table avec une intention droite, ne puisse en être écarté.
chrétiens de quelque classe et de quelque condition qu'ils soient, en sorte que nul, s'il est en état de grâce et s'il s'approche de la sainte Table avec une intention droite, ne puisse en être écarté.
Il y a donc une condition nécessaire pour pouvoir communier, c'est
d'être en état de grâce. Communier en état de péché mortel
constitue un grave sacrilège, une profanation du sacrement, comme
déjà saint Paul l'avait dit : Et celui qui aura mangé le
pain ou bu la coupe du Seigneur d’une manière indigne devra
répondre du corps et du sang du Seigneur. On doit donc s’examiner
soi-même avant de manger de ce pain et de boire à cette coupe.
Celui qui mange et qui boit mange et boit son propre jugement s’il
ne discerne pas le corps du Seigneur. C’est pour cela qu’il y a
chez vous beaucoup de malades et d’infirmes et qu’un certain
nombre sont endormis dans la mort.(I Cor. 11, 27-30)
Certains ne peuvent communier
De nos jours, on agite beaucoup la question des divorcés remariés
civilement ainsi que celle des personnes qui sont dans des situations
irrégulières du point de vue de l’Église, par exemple celles qui
vivent en concubinage. Il s'agit de ce que le droit canon appelle des
pécheurs publics. On ne porte pas de jugement sur la conscience de
ces personnes (Dieu seul connaît le fond du cœur de l'homme!) mais
on dit que d'un point de vue objectif, ces personnes sont dans une
situation de vie, contraire à la loi de Dieu, et que cela étant
public et connu, il y a un scandale pour la communauté chrétienne.
Elles ne peuvent donc pas s'approcher de l'eucharistie, lorsqu'elles
participent à la messe.
A ce sujet, citons deux textes récents du magistère. D'abord voici
ce que dit saint Jean-Paul II, au n° 84 de son exhortation
apostolique Familiaris consortio (22 novembre 1981) : L’Église,
cependant, réaffirme sa discipline, fondée sur l’Écriture
Sainte, selon laquelle elle ne peut admettre à la communion
eucharistique les divorcés remariés. Ils se sont rendus eux-mêmes
incapables d'y être admis car leur état et leur condition de vie
est en contradiction objective avec la communion d'amour entre le
Christ et l’Église, telle qu'elle s'exprime et est rendue présente
dans l'Eucharistie. Il y a par ailleurs un autre motif pastoral
particulier: si l'on admettait ces personnes à l'Eucharistie, les
fidèles seraient induits en erreur et comprendraient mal la doctrine
de l’Église concernant l'indissolubilité du
mariage. La réconciliation par le sacrement de pénitence -
qui ouvrirait la voie au sacrement de l'Eucharistie - ne peut être
accordée qu'à ceux qui se sont repentis d'avoir violé le signe de
l'Alliance et de la fidélité au Christ, et sont sincèrement
disposés à une forme de vie qui ne soit plus en contradiction avec
l'indissolubilité du mariage. Cela implique concrètement que,
lorsque l'homme et la femme ne peuvent pas, pour de graves motifs -
par l'exemple l'éducation des enfants -, remplir l'obligation de la
séparation, «ils prennent l'engagement de vivre en complète
continence, c'est-à-dire en s'abstenant des actes réservés aux
époux ».
Ensuite, citons le pape François, dans son exhortation apostolique
Amoris laetitia, au n°301 : Par conséquent, il n’est plus
possible de dire que tous ceux qui se trouvent dans une certaine
situation dite ‘‘irrégulière’’ vivent dans une situation de
péché mortel, privés de la grâce sanctifiante. Le pape
introduit ici une certaine distinction entre le for externe et le for
interne. Il y a d'une part la situation externe et publique, connue
de tous, qui est irrégulière du point de vue de l’Église et de
la loi divine. D'autre part, il y a le fond de la conscience
personnelle. Cela regarde aussi le confesseur qui accompagne les
personnes en question, avec lesquelles, dans le cadre d'un
discernement individualisé et prudent, il peut conclure que l'âme
peut avoir la certitude morale d'être en état de grâce.
Malheureusement, à mon sens, le pape ne développe pas suffisamment
sa pensée. Je pense donc qu'il faudrait que des précisions
ultérieures soient apportées pour que l'on puisse voir plus clair.
En attendant, disons ce qui est fermement établi. D'abord une
personne qui est en état de péché mortel ne peut absolument pas
communier, tant qu'elle n'a pas été réconciliée par le sacrement
de réconciliation, qui implique la volonté d'éviter le péché
mortel à l'avenir. Si par contre, une personne en situation
irrégulière a la certitude morale de ne pas être privée de la
grâce sanctifiante, elle peut communier là où sa situation n'est
pas connue, mais elle doit s'abstenir de le faire là où il y aurait
un scandale public.
Quand je parle de certitude morale, je veux dire que dans ce domaine
de l'état de grâce, on ne peut jamais avoir une certitude absolue.
La certitude morale cependant suffit. Quand on a conscience de ne pas
désobéir gravement à la loi divine, cela suffit pour pouvoir
communier. Dans le cas où on se tromperait de fait, la communion
effacerait le péché et nous mettrait dans la grâce de Dieu. C'est
ce que dit la théologie la plus classique.
La communion spirituelle
Ces principes fondamentaux étant clairement établis venons-en
maintenant aux applications spirituelles. Cela concerne d'abord les
cas où l'on ne peut pas communier, alors qu'on voudrait ou pourrait
même le faire. Comment assister fructueusement à la messe, sans
participer directement à la sainte table ? Pour certains c'est
une souffrance. Pourtant cela peut être dépassé, si on tient
compte de ce que la doctrine de l’Église nous enseigne. Et alors
même sans communion la messe pourra être source de grâce, de joie
et de bonheur.
En fait, je me suis trouvé plusieurs fois dans ce cas. En effet il
m'est arrivé, lors de voyages œcuméniques, d'assister à des
liturgies en pays orthodoxe, au cours desquelles il m'était
impossible de communier. J'assistais à de vraies messes, dans
lesquelles le Seigneur était réellement présent et s'immolait sur
l'autel en s'offrant à son Père, pour la gloire de Dieu et le salut
du monde. Mais au moment de la communion, je devais rester à ma
place et me contenter ensuite du pain béni.
Il faut alors pratiquer ce qu'on appelle la communion spirituelle.
Selon saint Alphonse de Liguori, la communion spirituelle peut
apporter autant de grâce que la communion sacramentelle, lorsque
cette dernière n'est pas possible. Cette communion spirituelle
consiste à se tourner vers le Christ pour lui dire qu'on l'aime et
lui demander de venir spirituellement dans notre cœur pour le
remplir de son amour et de sa grâce. Une telle prière est entendue
et exaucée par le Seigneur et la joie que le Christ nous donne alors
compense surabondamment la peine que nous fait la privation du
sacrement. Du reste dans la journée nous pouvons multiplier ces
communions spirituelles, notamment lors d'une visite au
Saint-Sacrement que nous pouvons faire en entrant à l'église à un
moment ou l'autre. En agissant ainsi, à la longue, notre vie
chrétienne sera joyeuse et heureuse. Comme le disait sainte Thérèse
de Lisieux, tout est grâce et lorsque nous sommes, même pendant un
long temps, privés des sacrements, l'amour et la miséricorde de
Dieu ne nous font jamais défaut.
Valeur de la messe en soi, indépendamment de la sainte communion
Mais il y a quelque chose à ajouter. La messe sans la communion a
une valeur infinie en soi. C'est le sacrifice du Christ, par lequel
une adoration, une action de grâce et une expiation infinies sont
offertes à Dieu, ainsi qu'une source illimitée de grâces pour
nous-mêmes, pour ceux pour qui nous prions et pour le monde entier.
Assister à la messe n'est donc jamais une perte de temps. Nous y
sommes réconfortés par l'écoute de la Parole de Dieu, qui nous
illumine. Nous prions et notre prière est unie à la prière du
Christ. Nous obtenons le pardon de nos fautes et nous apportons la
miséricorde de Dieu à nos chers défunts. Dans le cas particulier
d'une âme qui demeure dans le péché mortel, l'assistance
habituelle à la messe finira par lui apporter la grâce de la
conversion. Ainsi donc l’Église nous incite à redécouvrir la
richesse de ce trésor infini qu'est la messe.
J'aimerais, dans le cadre de cette réflexion sur le cas des
personnes qui ne peuvent communier, émettre un souhait. Ce serait de
rétablir dans la liturgie catholique ce qui existait autrefois et
qui existe encore dans l’Église orthodoxe, à savoir l'usage du
pain béni. Ce pain était bénit lors de l'offertoire et distribué
à tous, après la communion, au moment de la bénédiction finale et
du renvoi. Cela permettrait de faire sentir à ceux qui ne peuvent
communier qu'ils ne sont pas exclus et qu'ils sont encore membres à
part entière du corps de l’Église. Comme tout sacramental, le
pain béni apporte des grâces à ceux qui le prennent avec les
dispositions de foi et de confiance requises.
Conclusion : la sagesse de l’Église
Sous une apparence sévère, l’Église cherche toujours à être
miséricordieuse, mais la miséricorde ne peut être détachée de la
vérité ni de la sainteté de Dieu. Nous devons donc suivre les
règles qu'elle édicte, car en toutes choses, ce que l’Église
recherche c'est le bien et le salut des âmes.
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