vendredi 15 juillet 2016

Le Bon samaritain, homélie



L’Évangile nous raconte que, lorsqu'il vit l'homme roué de coups, gisant au bord de la route,le samaritain fut pris de compassion. Au sens littéral, le bon samaritain est l'image-même de la charité chrétienne, charité universelle, qui ne tient compte d'aucune distinction de race, de langue ou de religion. Mais dans la figure du bon samaritain, il y a aussi un sens mystique, car cet homme plein de compassion active est l'image du Christ en personne.




Le Fils de Dieu voyait du haut des cieux l'homme en butte au péché, au mal, à la souffrance et à la mort. Pour nous, il s'est anéanti et a renoncé à sa gloire, il est venu vers nous, il a partagé notre condition humaine en toutes choses, à l'exception du péché. Il s'est approché de nous pour nous guérir et nous ramener dans cette hôtellerie qu'est l’Église, où il prend soin de nous. Le pape François a dit de l’Église qu'elle devait être un hôpital de campagne. Durant son passage parmi nous, Jésus a exercé la miséricorde en pardonnant les péchés et en guérissant les malades, faisant le bien partout où il passait.


Au XXe siècle, le Christ a envoyé parmi nous un tout grand saint, qui fut une véritable icône du Christ souffrant par amour : le saint Padre Pio de Pietrelcina. Ce saint capucin du sud de l'Italie fut configuré au Christ crucifié pendant 50 années de sa vie, par le phénomène des stigmates. Vrai fils de saint François, le premier stigmatisé de l'histoire, le Padre Pio est une vraie parabole christique pour notre temps. A l'exemple du divin maître, il fut rempli de compassion pour la souffrance des hommes. Il aurait voulu prendre sur lui toute la souffrance des hommes, afin que tous puissent être heureux. Deux choses sont à retenir dans son cas. D'abord comme Jésus, il fut un apôtre de la miséricorde, en apportant le pardon des péchés. Il passait parfois dix-huit heures par jour dans son confessionnal. Innombrables furent les âmes réconciliées, apaisées, consolées par son ministère. Ensuite fut grande aussi sa charité envers les malades. Pour eux il construisit à côté de son monastère un vaste hôpital, la casa del sollievo della sofferenza. 


Nous sommes dans l'année jubilaire de la miséricorde voulue par le pape François. La parabole d'aujourd'hui nous fournit donc l'occasion de parler de la miséricorde.


La miséricorde est l'attribut divin le plus mystérieux. Il est aussi celui qui domine en Dieu, en colorant si je puis dire les autres attributs, comme la justice et la sainteté. La justice en Dieu est miséricordieuse, tout comme l'est sa sainteté. 


Essayons de comprendre par exemple ce rapport entre miséricorde et justice en Dieu et pour cela partons d'un exemple humain, celui de l'amour des parents pour leur enfant. Prenons l'exemple suivant : un père et une mère ont un fils. Ils ont pour lui un grand amour et l'enveloppe de tendresse. C'est leur enfant bien-aimé. Ils le couvrent de caresses et de baisers. Mais cet enfant se drogue. Deux attitudes peuvent alors exister chez les parents. Dans la première, ils disent à leur fils : « Nous t'aimons mais cela nous laisse indifférents que tu te détruises, c'est pourquoi continue à te droguer si cela te plaît ». Cette attitude ne serait pas un amour authentique. Un vrai amour serait plutôt celui qui fait dire aux parents : « Parce que nous t'aimons, nous te disons que c'est mal de te détruire par la drogue. Parce que nous t'aimons nous voulons tout faire pour te sauver de ton péché ».


Parce que sa miséricorde est authentique et brûlante d'amour pour l'homme, Dieu n'est pas indifférent devant notre péché. La miséricorde en Dieu n'abolit pas la justice. Dieu est à la fois bon et juste. Dieu aime le pécheur, mais en même temps condamne sévèrement le péché. Ou pour dire les choses autrement, c'est parce qu'il est amour que Dieu est aussi justice et sainteté. Dans sa justice, Dieu nous dit ce qui est mal, ce qui est destructeur pour nous. 


C'est donc une très grave erreur de nos jours de relativiser les commandements de Dieu sous prétexte de miséricorde. Cette erreur pousse certains à exiger de l’Église qu'elle modifie sa doctrine en matière morale, par exemple sur le divorce, l'avortement, la contraception ou l'homosexualité. Cette erreur provient d'une mauvaise articulation entre miséricorde et justice. Elle entraîne une fausse conception de la divine miséricorde. Un philosophe protestant, Paul Ricoeur, aimait dire qu'un Dieu gâteux était aussi idolâtrique qu'un Dieu croquemitaine. Croire en l'amour divin ne signifie pas que l'on voit en Dieu un vieux grand-père qui laisse tout faire.


La miséricorde est d'abord un don divin, répandu sur nous. Ce don exige de nous en retour que nous répandions cette miséricorde autour de nous. Jésus l'a dit : Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux. Que notre vie chrétienne soit ainsi une inlassable imitation du bon samaritain. Ce que Jésus dit à la fin de la parabole, il le dit à chacun d'entre nous : Va et fais pareil.







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