Office de la proscomédie dans le rite byzantin |
En second lieu, remarquons que le missel de 1962, comme les autres rites antérieurs à la réforme liturgique, n’a pas peur des redites, des doublets, des insistances. Il prend son temps, parce que l’homme a besoin de temps, sollicitant sans relâche un esprit vagabond pour le ramener à l’essentiel.
L’Évangile nous apprend que la Vierge Marie méditait, gardait fidèlement en son cœur (cf. Lc 2,19;51) les événements qui marquèrent la naissance de son Fils. Il doit en être de même du contemplatif, du moine : non multa sed multum, non pas la quantité, mais la qualité.
Amie de la tradition monastique, Hélène Lubienska de Lenval (1895-1972) prônait une pédagogie fondée essentiellement sur le silence et les rites. Elle écrivait :
» La liturgie est lente : elle aime la minutie, les redites et les préparatifs interminables. Elle tient son rythme de la pédagogie divine qui a modelé le peuple élu au moyen d’un rituel lent et minutieux. Lorsque, sous la pression de la vie moderne (frénétique parce que inféodée à la matière), elle se hâte, elle perd son efficacité psychologique et devient formelle… Elle reste opérante là où elle garde son rythme propre, chez les moines. La liturgie combat ensemble la lourdeur des muscles et l’impatience des nerfs ; elle impose en même temps le mouvement et la lenteur. Et c’est par la lenteur que la liturgie domine le temps. Parce que temps et matière sont corrélatifs et que l’on ne peut vaincre l’un sans l’autre. L’homme moderne va en sens inverse et tâche de déjouer le temps au moyen de la vitesse. Hélas ! loin de maîtriser la matière, il s’y enlise. »
Ajoutons une réflexion à propos du lectionnaire du missel de 1962 jugé pauvre. L’enrichissement abondant de la lecture de la Sainte Écriture issu de la réforme liturgique, la longueur de certaines péricopes, ne nuiraient-ils pas à la contemplation ? Certes, les laïcs qui ont de moins en moins de temps à consacrer à la lectio divina, peut-être même les prêtres séculiers, écrasés par le ministère, en tirent profit. Pour les moines, l’abondance et la variété des lectures, goûtées par certains et sûrement non sans valeur, apparaissent plutôt généralement comme excessives. Ce parti pris sacrifie la répétition de péricopes relues, ruminées, connues par cœur, jamais épuisées. La multiplication des Préfaces pourrait susciter la même réflexion. Le cardinal Ratzinger a évoqué sagement « quelques nouvelles préfaces… un Lectionnaire élargi – un plus grand choix qu’avant, mais pas trop – » qui pourraient être adoptées dans la forme extraordinaire : non multa sed multum. La sobriété invite à la contemplation.
Mon commentaire: Dans les rites orientaux qui ignorent le silence, à la différence du rite latin, c'est la répétition des formules qui favorisent l'intériorisation et le recueillement. Quand on répète de nombreuses fois la même chose, l'âme fint par être habitée par la prière. Chez nous le silence existe pour intérioriser une prière qui est plutôt marquée par la discrétion et la sobriété.
L’offertoire
Parmi les richesses du missel de 1962, beaucoup soulignent la profondeur des prières de l’offertoire : « Il est, affirme le cardinal Robert Sarah, ce moment où, comme son nom l’indique, tout le peuple chrétien s’offre, non pas à côté du Christ, mais en lui, par son sacrifice qui sera réalisé à la consécration » (ibid p. 210).
Suscipe sancte Pater…quam ego indignus famulus tuus… In spiritu humilitatis et animo contrito… Grandeur du mystère, du sacré, et humble condition du serviteur dont le Seigneur veut avoir besoin, se côtoient. Il en sera ainsi jusqu’au Placeat final : sacrificium quod oculis tuae majestatis indignus obtuli.
Mon commentaire: L'offertoire est un point faible de la liturgie actuelle. Le caractère sacrificiel de la messe est moins mis en valeur. Pourquoi ne pas introduire les formules de l'offertoire traditionnel dans la forme ordinaire? Dans la liturgie de saint Jean Chrysostome, le caractère sacrificiel est particulièrement mis en valeur, notamment dans le rite de la proscomédie, que le prêtre célèbre sur un autel latéral, avant la liturgie publique, et qui est un véritable offertoire, avec des prières émouvantes, qui évoquent la passion du Seigneur. De même, de nombreuses prières dites par le prêtre dans le cours de la célébration insistent sur cet aspect.
à suivre
Il serait en effet très souhaitable d'autoriser l'emploi de l'ancien offertoire dans le nouveau missel, ce serait une excellente idée.
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