La prière de Jésus
Un ouvrage traite particulièrement de la prière continuelle. Il s'agit de la Philocalie, recueil d'auteurs ascétiques, mystiques et monastiques orientaux, compilé au XVIIIe siècle et édité à Venise en 1782 par Nicodème l'hagiorite. On y trouve l'idée que la prière monologique remonte aux apôtres eux-mêmes, car cette forme de prière était voulue par le Seigneur lui-même. Cet anachronisme est significatif. En fait historiquement la prière monologique s'est développée dans un courant spirituel qui remonte aux pères du désert, comme Macaire et Evagre, et qu'on appelle l'hésychasme. Cette tradition va se fixer dans le moyen-âge byzantin.
Hésychasme vient du grec hésychia, terme qui signifie repos. Trois notions principales vont dominer ce courant spirituel:
1. Le repos de l'âme est le but recherché: une vie spirituelle calme, une unification intérieure et un cœur pacifié.
2. La prière consiste essentiellement en deux choses: l'invocation du nom de Jésus et la supplication pour le pécheur que je suis.
3. La prière du cœur: il s'agit de prier non pas avec son mental et son affectivité, mais dans son cœur, c'est-à-dire dans son moi profond.
Ces trois points attestent le côté englobant et unifiant de cette prière, impliquant la maîtrise des passions.
La tradition de cette Prière de Jésus remonte aux pères du désert et fut constituée au VIe siècle au monastère du Mont Sinaï. Elle connut son efflorescence au Mont-Athos au XIVe siècle et, de là, passa en Russie. C'est la prière monastique orientale par excellence. Elle connut une grande expansion. Lors de la publication de la Philocalie par Nicodème l'hagiorite, cette prière quitte les monastères et devient au XIXe siècle une prière pour les laïcs. En témoigne notamment un livre délicieux publié en Russie, après la guerre de Crimée et avant l'abolition du servage: Les récits d'un pèlerin russe. Ce livre est d'une fraîcheur très grande et nous raconte la vie d'un pèlerin qui traverse la Russie, en s'adonnant à la prière de Jésus.
Sans conteste un des adeptes les plus célèbres de la prière de Jésus fut Saint Séraphin de Sarov au XVIIIe siècle, qui privilégiait la prière silencieuse du cœur par rapport à l'office canonial. Sa fondation d'un monastère de moniales à Diviéévo en témoigne. A la règle de vie qu'il donna à ses filles spirituelles, il mit l'accent sur la prière personnelle en ne surchargeant pas les sœurs de prières communautaires. Ce saint va aussi introduire un note mariale à la prière du cœur. Il conseillait à ses disciples et enfants spirituels de dire le matin l'invocation: "Seigneur Jésus-Christ, ayez pitié de moi". Et après midi de dire: "Très Sainte Mère de Dieu, sauvez-moi". Une certaine variété dans la prière est donc légitime. Dire la prière de Jésus ne nous empêche nullement de dire aussi le rosaire latin. Pour les orthodoxes, Marie est la mère de la prière incessante et recourir à elle nous mènera ainsi à la prière continuelle. Du reste le Je vous salue Marie a une structure fondamentale identique à la prière de Jésus. La première partie invoque le nom de Jésus: "Jésus, le fruit de vos entrailles est béni", et la deuxième partie est une supplication propitiatoire: "priez pour nous, pauvres pécheurs".
La foi qui anime la prière de Jésus est donc celle qui croit en la puissance du nom du Sauveur. Elle rappelle ainsi maint passages des Actes des apôtres sur la puissance efficace et salvifique du nom de Jésus: "Aucun autre Nom sous le ciel n'a été donné aux hommes par lequel nous devrions être sauvés" (Actes 4, 12), et: "Alors sera sauvé, quel qu'il soit, celui qui invoquera le Nom du Seigneur" (Actes 2, 21). Saint Paul dira de même: "Tu es sauvé lorsque ta bouche proclame que Jésus est le Seigneur" (Rom. 10, 9).
L'occident a aussi connu la dévotion au saint Nom de Jésus, avec saint Bernard, saint Bernardin de Sienne et saint Jean de Capistran. La puissance du Nom: le Nom c'est la personne même du Ressuscité. En l'invoquant on l'attire dans notre vie ou plutôt on le rejoint au fond de notre cœur où il est présent. Ce Nom nous sauve, nous guérit, nous purifie et chasse les esprits impurs. Mais il le fait si nous l'invoquons sans cesse, comme le dit un saint orthodoxe du XVIIIe siècle, Paissy Velitchkovsky: "Porter constamment dans le cœur le très doux Jésus et être enflammé par le rappel incessant de son nom bien-aimé d'un amour ineffable pour lui".
A suivre
La prière du coeur III le lien ne fonctionne pas merci de le rétabir si possible
RépondreSupprimerPère Thierry
Je ne vois pas où il y a un problème. Il faut aller à la page d'accueil en cliquant sue Simon Noel osb et on trouve tous les articles publiés sur ce blog
SupprimerBonsoir,
RépondreSupprimerIl y a effectivement un problème avec le lien 3.
Comme l'intervenant précédent, je n'arrive pas à l'ouvrir alors que j'ai réussi à ouvrir les liens 1,2 et 4.
Il serait bon que nous puissions consulter le lien 3 afin que cet enseignement soit plus complet.
Merci d'avance,
Clarisse
Je ne sais à partir de quel site vous cherchez à ouvrir ce lien vers le troisième article. Il se peut que ce site ait mal référencé ce lien. C'est alors eux qu'il faut contacter. Si vous êtes sur la page d'accueil de mon blog, le chapitre 3 est là et il vous suffit de cliquer sur plus d'info pour avoir la totalité de l'article. Tenez-moi au courant
RépondreSupprimerBonjour révérend père,
RépondreSupprimerConnait-on le contenu de la philocalie dont parle le pelerin russe ?
Il existe une philocalie aux editions bellefontaine mais on imagine mal le pelerin se déplacer avec tous ces volumes dans son sac.
Bonjour révérend père,
RépondreSupprimerConnait-on le contenu de la philocalie dont parle le pelerin russe ?
Il existe une philocalie aux editions de bellefontaine mais on imagine mal le pèlerin se mouvoir avec onze volumes dans son sac. Il semble qu'il n'aie qu'un ouvrage.
Probablement que le pèlerin russe utilisait la philocalie slavonne, établie et éditée en 1794 par Paissius Velitchkovsky. C'était peut-être une synthèse de ce qu'avait publié en grec Nicodème l'hagiorite. De même en français nous avons une petite philocalie en un volume, éditée par Grouillard. Il va de soi que les textes philocaliques sont innombrables et que dès lors on se contente souvent d'abrégés
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