jeudi 3 novembre 2016

La messe en rite romain à Chevetogne

Le monastère de Chevetogne, communauté bénédictine qui prie pour l'unité des chrétiens, et qui dépend de la Congrégation pour les Eglises orientales à Rome, dont le titulaire est actuellement le cardinal argentin Sandri, a cette particularité d'avoir deux églises. Il y a une église orientale, datant de la fin des années Cinquante, entièrement ornée de fresques peintes par deux élèves du célèbre fresquiste grec Kontouglou, dans laquelle on célèbre le rite byzantin-slave. Il y a une église latine, consacrée par Mgr Léonard en 1993, dans laquelle se célèbre l'office monastique bénédictin et la messe en rite romain. Le monastère se trouve entre les deux églises, comme un trait d'union symbolique entre les deux poumons de l'Eglise universelle, l'orient et l'occident.

L'église latine a un plan basilical romain: un atrium, avec son labyrinthe traditionnel et une statue de la Sainte Vierge, celle qui est l'arche d'alliance et qui nous introduit dans le mystère du Christ, une nef, dont les dimensions rectangulaires sont basées sur la proportion du nombre d'or, et un sanctuaire, à l'orient, dans la conque duquel on peut admirer une grandiose fresque du Christ de l'apocalypse, peinte par le moine russe Zénon. L'autel au centre du sanctuaire a la forme traditionnelle d'un tombeau. Contre le mur du sanctuaire se trouve un banc en pierre pour les prêtres. L'autel est donc au centre de l'attention. Dans la nef, entre les stalles des moines, un aigle est le lieu des lectures et de l'homélie.
La messe célébrée a Chevetogne dans le rite romain me semble être un très bel exemple de l'application de la réforme liturgique, car elle conjoint les rubriques actuelles avec un sens réel de la tradition liturgique latine et bénédictine. Pour vous donner un exemple, voici comment s'est déroulée la messe de la Toussaint de cette année.
C'est au chant de l’introït grégorien Gaudeamus omnes in Domino qu'eut lieu la procession d'entrée du clergé. Tous les prêtres concélébrant étaient revêtus de la chasuble. Deux diacres en de superbes dalmatiques accompagnaient les prêtres. L'un d'entre eux portait l'évangéliaire, qu'il déposa sur l'autel. Eut lieu, pendant qu'on chantait le verset et le Gloria Patri et qu'on reprenait l'introït, l'encensement de l'autel.
Le premier célébrant se rendit ensuite à sa place pour le signe de croix, la salutation et le confiteor. Ensuite nous avons chanté le kyrie et le Gloria de la messe des anges et l'oraison de la Toussaint fut chantée par le premier célébrant.
Ce furent ensuite: la lecture de l'apocalypse, le chant du graduel Timete Dominum, la lecture de l'épître, le chant de l'alléluia Venite ad me et un diacre, après avoir demandé la bénédiction prit l'évangéliaire sur l'autel et descendit à l'aigle pour proclamer l'évangile des béatitudes, après avoir encensé l'évangéliaire. Un père prononça l'homélie: En voici le texte
Nous avons ensuite chanté le credo en latin. Pour la prière universelle, un diacre descendit à l'aigle et le retourna de manière à chanter les intercessions, tourné vers l'autel.
Pendant que le chœur chantait l'offertoire Justorum animae, les diacres préparèrent l'autel: le corporal et le missel, tandis que deux frères venaient du fond de l'église en procession portant les hosties et le vin de la messe. Un diacre mit les hosties sur la patène et présenta celle-ci au célébrant qui commença l'offertoire. Un diacre versa le vin et l'eau dans le calice puis donna ce dernier au célébrant qui en fit l'offrande. L'encensement traditionnel suivit et après l'encensement des moines d'abord et ensuite du peuple, fait au milieu de la nef, l’acolyte encensa le diacre et on déposa l'encensoir au pied des marches du sanctuaire, afin que durant la prière eucharistique la montée de l'encens soit un beau symbole de notre prière et de notre adoration.
Ce furent ensuite la préface, le sanctus de la messe des anges et la seconde prière eucharistique. Notez qu'à Chevetogne, on utilise souvent encore le canon romain mais on prit cette fois la prière plus courte, attribuée à Hippolyte de Rome. On récita le Notre Père et on chanta l'agnus Dei de la messe des anges. Le baiser de paix se fit comme d'habitude. Le premier célébrant donna la paix aux diacres, puis aux deux concélébrants les plus proches. Les diacres portèrent la paix aux deux plus anciens moines et cette paix se transmit de moine en moine jusqu'aux plus jeunes. Ces deux derniers transmirent la paix à l'assemblée. Tout se fit donc calmement et avec dignité.
Le clergé communia et le prêtre célébrant donna aux diacres la communion au calice. La communion fut ensuite donnée aux frères et à l'assemblée sous les deux espèces, le premier célébrant donnant le Corps du Christ et les deux diacres le calice du Sang du Seigneur. On chanta alors un chant de communion en français, sur une mélodie grégorienne.
Suivit un temps de silence et d'action de grâce, pendant lequel les diacres procédaient à l'ablution des vases sacrés à la chapelle du Saint-Sacrement. Les diacres ensuite firent le rangement de l'autel.
Après l'oraison de la communion, on fit la bénédiction solennelle de la Toussaint sur les fidèles inclinés et un diacre chanta l'ite missa est. La procession de sortie du clergé conclut enfin cette célébration, magnifique, paisible et nourrissante.


4 commentaires:

  1. Cela semble magnifique.
    Une question cependant: pourquoi ne pas célébrer la liturgie entièrement en latin, tout comme (si je ne m'abuse) la liturgie byzantine est célébrée à Chevetogne entièrement en slavon ou en grec ? De même, pourquoi ne pas célébrer la messe "ad orientem", toujours comme le font les moines "byzantins" de Chevetogne ?
    Ne voyez ici aucune agressivité, juste une curiosité. J'ai récemment découvert votre blog, que je trouve passionnant.

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    1. Au rite byzantin à Chevetogne on fait des parties en français ou en d'autres langues modernes selon les personnes présentes: les lectures et les litanies. Vous avez raison la célébration vers l'orient au rite romain serait une bonne chose. Espérons que cela finira par se faire.

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    2. Je vous remercie pour votre réponse. En fait, il me semble effectivement justifié de proclamer les lecture en langue vernaculaire (quoiqu'un évangile proclamé en latin a une force impressionnante). Cependant, pour ce qui est de la messe comme telle, dans la partie proprement adressée à Dieu, il me semblerait plus légitime de s'exprimer en latin (dans le rite romain), en tant qu'il s'agit d'une langue "sacrée". Je pense notamment à la prière eucharistique.
      Attention, je ne suis pas traditionaliste, mais il me semblerait justifié de revenir (partiellement) au latin.
      Après, n'étant jamais allé à Chevetogne (mais rêvant d'y aller un jour), il m'est difficile de juger de la situation... aussi m'en abstiendrais-je.

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  2. Le Monastère de Chevetogne est une belle image de cette belle liturgie céleste. ce monastère est un des reflets de l'amour de Dieu qui s'incarne à travers la beauté de la liturgie latine et byzantine. Cependant comme tant d'autres monastères de France, il me plaît à rêver que le prêtre qui est un Alter Christus puisse célébrer les Saints Mystères dos au peuple et face à Dieu, face à l'Orient, face à la Lumière que représente le Christ.Il est peut-être temps malgré les réticences très humaines de certains pasteurs d'appliquer et de faire vivre ce que le Cardinal Robert Sarah nous enseigne dans son beau livre intitulé la Forece du silence. Le Monastère est une école de prière et de liturgie. C'est la préfiguration de ce qui se passe en la Jérusalem Céleste. En grande union de prière. En Jésus par Marie en compagnie du Bienheureux Père St Benoît.

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