La pratique de la prière de Jésus (suite)
Souvent la pratique de la prière monologique, avec sa facilité et sa simplicité, nous procurera des états intérieurs caractérisés par la joie spirituelle, la lumière intérieure et la consolation de l'âme. On sait que sainte Thérèse d'Avila déconseillait aux âmes mélancoliques (nous dirions aujourd'hui dépressives) de pratiquer trop longuement la forme d'oraison qu'elle enseignait. Le danger d'une oraison discursive est en effet celui de se centrer sur son moi et d’aggraver ainsi son état de mal-être. Par contre, l'invocation du Nom divin nous décentre de nous-même et nous centre sur le Christ. Aussi la prière de Jésus est à conseiller comme chemin d'oraison à tous ceux, nombreux de nos jours, qui ont l'âme déprimée, abattue ou tourmentée.
Mais soyons clairs. Il ne faut nullement rechercher à sentir quoi que ce soit dans la prière de Jésus. Cela est capital. C'est la volonté de prier qui compte et non le ressenti. Faire de la prière une recherche de consolations sensibles est un chemin erroné, car entaché d'amour propre. Remercions le Bon Dieu, s'il nous accorde sa consolation dans la prière, alors que nous ne l'avons pas recherchée pour elle-même, mais souvenons-nous de ce que disait à ce propos, un abbé bénédictin du XVIe siècle, Louis de Blois: "Que l'ascète désireux d'atteindre cette union même, dès qu'il se sent enflammé de l'amour de Dieu et tiré vers le haut, coupe court à toute image" (Institution spirituelle XII, 3,1). Cela signifie que lorsqu'on ressent une grande consolation spirituelle, il importe à nouveau de rechercher le silence intérieur et de couper court à toute image ou à toute impression sensible.
De même, il faut éviter d'en rester au niveau mental, alors que la prière doit être celle du cœur profond, du centre de l'âme. L'imagination, la réflexion trop poussée, et d'autres choses qui relèvent du pur mental sont à proscrire. Seule compte la concentration sur la prière, en évitant toute autre pensée. Voici ce qu'écrivait à une de ses dirigées à ce sujet un saint russe, Théophane le reclus: "Il convient de descendre du cerveau dans le cœur. Pour le moment, il n'y a chez vous que des réflexions toutes cérébrales sur Dieu, mais Dieu lui-même reste à l'extérieur". Et sur ce thème du silence intérieur, un autre saint russe, Nil de la Sora, écrivait: "Il convient de rechercher le silence de l'esprit, d'éviter toutes les pensées, même celles qui paraissent licites, de fixer constamment les profondeurs du cœur, et de dire: Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi".
La prière du cœur c'est respirer Dieu. On peut donc associer notre prière à notre respiration. Inspirer calmement en disant: "Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu", et expirer doucement en priant: "ayez pitié de moi, pécheur". Pour certains cette façon de faire les amène à une lente pacification de tout leur être. Pour d'autres, cela ne les aide pas spécialement. Il ne faut pas accorder trop d'importance à cette question. A chacun de voir ce qui lui convient le mieux.
Enfin, un dernier conseil. Il faut que notre prière nous décentre de nous-même et nous fixe en Dieu seul. Un des moyens pour s'oublier sera aussi de prier pour les autres. On peut notamment conseiller aux personnes dépressives justement de ne pas parler d'elles-mêmes dans la prière mais de prier pour les autres et aux grandes intentions du Cœur de Jésus et de l'Eglise. Elles s'oublieront et cela ne leur fera que du bien. Un moyen simple est de faire la prière de Jésus de cette manière: on commence par dire pour qui on veut prier et à quelles intentions personnelles ou générales, en ne craignant pas d'énumérer devant Dieu les prénoms des vivants et des défunts que l'on veut recommander, et dire alors tout simplement pendant tout le temps que durera la prière: "Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, ayez pitié de nous".
A suivre
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