Un film américain
récent, Novitiate, de Margaret Betts, vaut la peine de
quelques commentaires. On est embarrassé quand on désire comprendre
les intentions profondes des réalisateurs. S'agit-il d'un film de
plus pour salir le catholicisme ? Certains le comprendront
ainsi. Cependant les quelques textes qui terminent le film, juste
avant le générique, sur l'hémorragie dans les communautés
religieuses féminines des années Soixante (des dizaines de milliers
de religieuses ont quitté leur communauté aux États-Unis après le
concile) permettent une interprétation différente.
L'argument du film est le
suivant : Une jeune fille de 17 ans, Cathleen (Margaret
Qualley), fille d'une mère agnostique, ressent depuis son
adolescence le désir très fort de ne vivre que pour l'amour de
Dieu. Elle entre dans une communauté contemplative très stricte où
l'on vit cet idéal de la religieuse comme épouse de Jésus-Christ.
Nous sommes en 1964 et le concile bat son plein. Malgré les
pressions de l'archevêque du lieu, la mère supérieure n'entend
nullement renoncer à l'idéal traditionnel de la vie religieuse
contemplative féminine. Cela semble bien être le cas aussi de
l'ensemble de la communauté. Elle doit un jour lire la décision de
l'archevêque à la communauté : accepter la messe en anglais
et face au peuple, port facultatif de l'habit religieux, et last but
not least, renoncer à voir une quelconque différence entre une
religieuse consacrée à Dieu et éprise de perfection, avec
n'importe quelle autre femme du peuple de Dieu. Dans la chapelle
ensuite la mère s'effondre de douleur mais réaffirme qu'elle ne
cessera jamais de vouloir être uniquement épouse de Jésus-Christ.
Ce qui frappe chez les
sœurs, c'est que tout est centré sur Dieu et sur la recherche d'une
perfection par amour pour Lui seul. On voit là l'idéal de la
parfaite et véritable épouse de Jésus-Christ, qui a façonné des
générations de moniales. C'est cet idéal que les novateurs veulent
détruire. Tel est le fond du débat. Quoi qu'on pense de Vatican II,
il faut constater que la crise qui a suivi ces assises fut terrible
pour la vie religieuse. Il y a eu plein de changements, la plupart du
temps dans le sens du naturalisme et non d'un véritable esprit
surnaturel. Mais y a-t-il eu un renouveau ? Dans l'ensemble,
malgré des exceptions, non. On juge l'arbre à ses fruits :
noviciats vides, provinces fusionnées, sécularisation à outrance,
disparition de l'habit, du silence, de la prière. Si l'application
du concile a donné de bons fruits, il y en a eu aussi de mauvais.
Bref la fin du film peut se comprendre comme une dénonciation des
ravages commis par les novateurs.
Quelles furent les
erreurs commises ? La réforme liturgique ? Un œcuménisme
mal compris ? Une ouverture au monde se transformant en un culte
de l'homme ? Tout cela plus ou moins. Selon moi, la crise
survenue est d'abord et avant tout une crise de l'oraison. Je suis
persuadé que si à l'époque, l'ensemble du clergé avait eu une vie
d'oraison suffisante et authentique, il n'y aurait pas eu tous ces
ravages. Une âme d'oraison en effet vit dans le calme, dans une
ambiance surnaturelle et reste pondérée dans ses décisions. Après le concile, l'une des initiatives les plus heureuses pour répondre à la crise fut la fondation du centre international d'oraison à Troussure par le Père Caffarel. La scène où sœur Cathleen prononce ses vœux, à la fin,semble indiquer que la seule chose qu'elle recherche n'est rien d'autre que l'union d'amour avec le Christ.
On peut aussi évoquer
ici le film Le visiteur (Catholics), de
Jack Gold (1973) qui met en scène la question de l'eucharistie :
un visiteur de Rome envoyé dans une communauté monastique
irlandaise revenue à la messe traditionnelle en latin. Dans ce film,
les questions liturgiques cachent derrière elles un débat plus
fondamental sur la nature de la messe. Ce film finit sur une scène dans laquelle la communauté prie le Notre Père. Cela confirme que c'est dans la prière que tout se joue.
Les
reprises de ces thèmes dans le cinéma doivent être perçues par
nous comme une invitation à revenir à la foi et à une perception
surnaturelle de ce que nous vivons dans les crises actuelles.
Bonjour,
RépondreSupprimerComment peut-on encore incriminer à ce point le Concile Vatican II, ou bien ne serait-ce que douter de sa responsabilité ?
On est en peine à la lecture de ses textes, de trouver la source de tout ce dont on l'accuse.
En fait, les seuls responsables de la crise de l'Eglise sont ceux qui ont cédé à un esprit révolutionnaire et ont agi en dictateurs, à tous les niveaux de responsabilité dans l'Eglise. Pas la peine de se cacher derrière un concile fantasmé.
Aujourd'hui, on est encore en attente de son application.
L'histoire est ancienne. Quand on lit des descriptions sur la situation de l'Eglise à la fin du XIXe siècle, on retrouve déjà les lignes de fractures actuelles. Je ne sais pas s'il faut accuser le Concile en lui-même, ou s'il ne faut pas plutôt accuser la manière dont on a voulu lui faire dire ce qu'il n'a jamais dit : le chant grégorien est censé rester majoritaire, la langue latine bien présente sauf en cas d'empêchement majeur, le soin dans la liturgie et la formation liturgique est mise au premier plan, les vêpres du dimanche et des solennités sont censées être remises au goût du jour le plus possible, etc... Mais si on écoute le "Concile des media" comme le disait Benoît XVI, (et nombre de clercs on voulu n'entendre que ce son-là) le son de cloche est tout autre.
RépondreSupprimerAvec mon épouse, il nous arrive de dire que nous allons régulièrement à la messe sous sa forme extraordinaire pour sa plus grande fidélité à Vatican II...